mardi 16 octobre 2018
Aragon, la vive intelligence et la bêtise
Par admin, mardi 16 octobre 2018 à 09:10 :: Cinéma/Musique/théâtre
Une page du beau livre d’Entretiens de Pierre Boulez avec Michel Archambaud (Gallimard 2016) me confirme dans l’intuition que j’ai toujours eue sur Aragon, à la fois l’un des plus brillants esprits du 20ème siècle et prisonnier de sortes de pulsions de radicalité qui me semblent salir son œuvre.
« Ce qui m’a séparé de Jean-Louis Martinet et de Serge Nigg, ce fut le réalisme socialiste. Là, je n’ai pas du tout marché. Les thèses d’Andréï Jdanov, le ministre de la Culture de Staline après-guerre, et ses oukases sur la musique m’ont guéri à tout jamais du communisme. C’était absurde. Les nazis avaient déjà fait la même chose : eux aussi avaient légiféré sur ce qu’il fallait faire et ne pas faire en matière d’art. (…) André Fougeron et Louis Aragon étaient insupportables d’histrionisme et légiféraient en permanence sur la peinture acceptable et celle qui ne l’était pas. Aragon était toujours aux ordres des dernières malhonnêtetés du parti. Un jour, vous le trouviez faisant l’éloge de Tito, puis peu après, le même Tito était devenu la lie de l’humanité. Aragon n’était pas le seul, il y en avait beaucoup d’autres dans son genre, un homme politique comme Jean Kanapa, par exemple… » (Pierre Boulez, Entretiens, Folio p36)