La littérature sous caféine


vendredi 15 février 2019

Rien que pour cette lettre...

... je suis heureux d'avoir publié ce roman, "J'ai entraîné mon peuple dans cette aventure", que peu de gens ont pourtant lu et dont presque personne n'a parlé, sauf Le Monde des Livres en quelques jolies lignes.

dimanche 7 juin 2015

Nauru dans "Le Monde des Livres"

C'est à l'occasion de mon sixième livre (et quatrième roman) que Le Monde des Livres (édition du 29 mai 2015) me fait l'honneur de quelques lignes - certes peu nombreuses, mais agréables.

"Spéculations insulaire

21 kilomètres carrés, 10 000 habitants : c'est l'île de Nauru, dans le Pacifique. Après son indépendance en 1968, ce minuscule territoire devint l'un des pays les plus riches du monde grâce à ses réserves de phosphate ; trente ans plus tard, l'Etat a fait faillite. Si ces faits sont réels, Aymeric Patricot a choisi de les raconter à travers le personnage fictif de Willie, Philippin immigré sur l'île, qui en deviendra le président, guidé par Erland, un Occidental qui l'initie au libéralisme. Grisé par ses premiers succès, Willie se laisse entraîner dans des placements hasardeux. Entre épopée et conte philosophique, c'est un livre profond et poétique sur les ravages de l'économie de marché et l'apprentissage de la liberté." (Virginia Bart)

mercredi 1 avril 2015

"Un roman très calmement très ambitieux"

Très bel article de Marin de Viry dans la Revue des Deux Mondes (avril 2015) à propos de "J'ai entraîné mon peuple dans cette aventure".

La trajectoire nihiliste et ratée des ambitieux à tête de vent

Une île du Pacifique dotée, malheureusement pour elle, de ressources minières. Un peuple alangui, vaguement consanguin, cancanier, de religion mal stabilisée, et perpétuellement renvoyé à lui-même par l'océan. L'histoire qui passe, de temps en temps : les Australiens débarquent et exploitent la mine, puis les Japonais l'envahissent, puis l'île est libérée et devient indépendante. Le narrateur, qu'on suit de l'ascension à la chute, n'est pas tout à fait natif de l'île ; il y a été importé, certes jeune, mais l'écart avec les vrais îliens est suffisant pour qu'il y puise un désir de s'intégrer à eux et de les dominer. Désir qu'il va assouvir en entrant dans l'administration de la compagnie minière gérée par les Australiens, principale pourvoyeuse de fonds de l'île, puis en faisant une carrière politique qui le mènera à la présidence, l'indépendance venue.

Trois pôles dans l'existence de ce narrateur : sa carrière politique, son adultère, sa femme. Et une sorte dalter ego fascinant et fatal, de modèle à moitié détesté inconsciemment, à moitié adulé : le directeur financier de la compagnie pour laquelle il travaille. Cet homme qui initie le narrateur aux ressorts du capitalisme est le portrait type du jouisseur libérallibertaire, au cynisme occidental, au relativisme moral, au détachement, et à la prédation décontractée.

C'est un roman de destin : on prend le narrateur jeune, on le quitte à l'agonie. Il aura raté sa vie entière parce qu'il l'aura orientée vers une réussite qui n'était pas la sienne. Heureusement pour lui, sa déchéance sera suffisamment longue et complète pour qu'elle prenne un sens précis. Il échouera à se faire réélire aux présidentielles face à son rival, qui est, lui, un pur îlien ; il perdra sa femme (et ses enfants au passage) ; il perdra sa maîtresse ; il perdra son ami. Il entrera dans l'éternité sans avoir rien accompli qui lui soit propre, et abandonné de tous. C'est un homme remarquable tout en étant sans bilan et sans rayonnement ; un homme méprisé, y compris par lui-même, qui a eu son heure de gloire. Où est l'explication de ce qui n'a pas marché ? Il a simplement commis une grosse erreur d'interprétation de la vie : la prendre pour un appel à une réussite empruntée. Ce roman suit au fond la trajectoire nihiliste et ratée de tous les ambitieux à tête de vent. Ça fait du monde.

Sur le dossier « femmes », le narrateur se met dans le pire des cas : il trompe sa femme tout en l'aimant. Dans ce cas extrême, la loi veut qu'il ne suffise pas de tromper sa femme avec sa maîtresse, encore faut-il tromper sa maîtresse avec sa femme : double ration d'hypocrisie et donc de travail psychique, auquel peu de cerveaux d'homme sont capables de résister durablement sans développer une pathologie chronique. Celle-ci a pour nom le syndrome de l'adultère sans cause : l'homme flotte bêtement entre deux femmes, et finit par flotter sur tous les sujets. Il choisit sa maîtresse sous le mince prétexte qu'il la désire depuis longtemps, qu'elle n'a rien contre les rapports sexuels dans les sous-bois et qu'elle est très belle. Sa maîtresse n'est que sa faiblesse, et il ne le voit même pas. Comme il est lâche, là aussi sans le savoir, cette aventure devient consubstantielle à sa vie ; pas moyen de la maîtriser ; et donc c'est elle qui le maîtrisera.

Sur le dossier politique, il profite de la vague de modernisation qui suit l'indépendance et de la pluie d'argent qui tombe de l'exploitation des mines pour engager son pays dans la voie de la modernité occidentale. Le peuple souverain marche dans la combine, jusqu'au moment où les revenus cessant avec la fermeture de la mine épuisée, le budget devient intenable, et le président se retrouve dans l'obligation, impossible à tenir, de financer ce qu'il a créé : beaucoup de services publics, plombés par des syndicats autistes. Et c'est la faillite. La naïveté du narrateur, dans le choix de ses attachements personnels comme en politique, est la conséquence d'une personnalité qui est restée à l'état de projet, tandis que son masque social est au contraire sophistiqué, abouti. Il s'est façonné sur le modèle de cet Australien qui lui apprend tout, qui lui désigne tous ses désirs. La personne du narrateur est une friche, son mensonge est une oeuvre.

C'est un roman frappant, profond, avec quelque chose de déterminé, de calmement ambitieux qui prévient en sa faveur. Je dirais même plus : il est très calmement très ambitieux. Rauque comme Conrad (la cruauté reptilienne dans un monde hostile et étrange), inexpiable comme Maupassant (l'art de la trajectoire).

lundi 9 février 2015

Une recension très complète de "J'ai entraîné mon peuple..."

Sur le blog Appuyez sur la touche lecture , une recension très complète de "J'ai entraîné mon peuple dans cette aventure" :

"Le plus haut degré de la sagesse humaine est de savoir plier son caractère aux circonstances et se faire un intérieur calme en dépit des orages extérieurs" (Daniel Defoe).

J'aurais parfaitement pu prendre comme titre de ce billet la phrase mise en exergue de notre livre du jour, également tirée de "Robinson Crusoë", mais je suis allé en chercher une autre. Coquetterie de blogueur, disons. Mais, vous verrez que le roman de Defoe va revenir dans le courant de ce billet, c'est certain. En attendant, préparer vous à voyager dans un endroit paradisiaque, une de ces fameuses îles dont quelques images nous feraient automatiquement rêver, surtout en ce gris et froid hiver. Mais, comme souvent, quand il y a paradis, l'enfer n'est jamais très loin. Aussi voisin que le rêve l'est du cauchemar. Aymeric Patricot s'empare d'une histoire vraie, qui aurait pu s'appeler "Grandeur et décadence de l'île de Nauru", mais qu'il raconte, en y incluant une trame romanesque sous le titre "J'ai entraîné mon peuple dans cette aventure" (en grand format aux éditions Anne Carrière). Et, au coeur de tout cela, un personnage dont le rêve était l'exact symétrie des nôtres...

[...]

samedi 24 janvier 2015

Présentation du roman à la librairie La manoeuvre

Je présenterai "J'ai entraîné mon peuple dans cette aventure" à la librairie La Manoeuvre, le mardi 27 janvier 2015, à partir de 19 heures - 83 rue de la Roquette dans le 11e. La présentation sera suivie d'un verre sur place puis d'un dîner dans le quartier.

lundi 19 janvier 2015

"J'ai entraîné mon peuple..." sur France Bleu

Le Castor aime l'aventure ("J'ai entraîné mon peuple dans cette aventure")

Un beau billet de Vincent Edin sur son Blog du Castor:

"Je ne sais pas vous, mais je n'ai pas réussi à lire depuis le 7 janvier. Quelques centaines d'articles, quelques dizaines de tribunes, de points de vue, de désintox et de décentrages; beaucoup trop de cette infobésité qui nous a submergé, englouti, sans que nous puissions nous en détacher. J'ai essayé, en vain. J'ai lu un livre sur les luttes des intermittents du spectacle, mais un livre de travail, Stabilo en main et notes à venir. Aisé. Mais s'échapper avec de la fiction, impossible. J'ai bien tenté de suivre le grand Ian Mc Ewan, mais ce livre que j'ai fini mardi dernier m'a filé entre les doigts. D'un point de vue technique, on peut considérer que je l'ai lu puisque j'ai atteint la dernière page, mais il n'en restera rien. Qu'il me pardonne.

Et puis je suis tombé sur le livre d'Aymeric Patricot. Ces deux derniers livres étaient des essais, où l'on trouvait par petites touches sombres des pans de l'horreur actuelle. "Portrait du professeur en territoire difficile" parlait notamment des tensions dans certains quartiers, des tensions ethniques, sociales surtout, identitaires. Un livre sans excès qui n'en était que plus fort. Puis les "petits blancs", une plongée passionnante dans la France hors caméra où l'on avait assimilé, à tort, Patricot a un émule de Zemmour. J'imagine que comme pour Charlie, ça doit être dur d'être aimé par un con. Et que cela lui a donné l'envie de s'évader.

Après avoir terminé le roman, j'apprends qu'il s'agit d'une histoire en partie vraie. Il y a vraiment eu une île d'Océanie devenu la plus propsère au monde grâce à la richesse de ses roches, pleines de phospate. Cela m'a vraiment surpris, non que ça ait existé, mais que Patricot s'en soit inspiré tant ce texte souffle l'évasion et la liberté fictionnelle. Un vrai roman. Et ça fait du bien.

Un vrai roman avec un protagoniste pauvre et humble, mangé par l'envie d'échapper à sa condition, à ses shorts déchirés. Il y a des figures pleines de vies, mentor économique, opposant politique, la femme et la maîtresse, tous vivent parfaitement, mais autour de ce protagoniste, Willie, passionnante figure. Passionnant car il incarne la traduction la plus absolue du bon type au bon moment. Quand il arrive sur l'île, il s'agit d'un rocher sans intérêt. Et l'économie débarque sans coup férir, comme dans la fable de Lordon (j'ai oublié le titre, mais c'est bien et dans la République des Idées). Ils avaient des carrières, ils se découvrent nababs et aspirent au consumérisme. Willie a de l'ambition et va négocier pour tout. Classiquement et en accéléré, l'obésité succède à la malnutrition. Tout va trop vite mais personne ne se pose pour réfléchir, comme l'écrit Patricot "les salaires ont doublé. Même les oisifs vivaient de ce que leur transmettaient familles et amis. Les inégalités s'accroissaient, mais l'euphorie générale gommait tout ressentiment". Quel parfait résumé des 30 glorieuses. Plus dur fut la chute que l'on vit de façon factuelle avec l'arrêt des pelleteuses, et métaphorique avec la déchéance de Willie, prostré, interdit devant une déchéance qu'il n'a pas vu venir, grisé qu'il était par les courbes sans cesse en hausse.

Parce que ça se lit comme un roman et que ça donne à réfléchir sur l'absurdité de la matrice dominante avec un décentrement géographique suffisant pour ne pas y voir un roman à clé, "j'ai entraîné mon peuple dans cette aventure" fait beaucoup de bien à l'âme. En ce moment ce sont les soldes, période pendant laquelle pour 18 euros on ne parvient pas à se procurer du bien être. Pour le même prix, on peut s'offrir ce livre, sans doute une bien meilleure affaire."

vendredi 16 janvier 2015

"Grandeur et misère du développement"

Une brève dans Ouest France du 14/01/2015 à propos de "J'ai entraîné mon peuple dans cette aventure".

"Quand le jeune Willie débarque sur l'île de Nauru, en Océanie, dans les années trente, il est loin de se douter que la petite colonie britannique deviendra bientôt la république la plus prospère du monde, et qu'il en sera le maître Pour l'instant, fuyant la misère qui a tué son père aux Philippines, il compte bien s'intégrer au système de production occidental, entreprise prométhéenne d'extraction du phosphate qui, tout en enrichissant l'île, la ravage. Ce roman raconte, sur plusieurs décennies, son irrésistible ascension et sa chute, épopée dérisoire et brutale d'un homme confronté aux vertiges du pouvoir a l'ère des décolonisations. Comment, quand on veut dominer le sort, rester fidèle a soi-même comme aux autres ? Une vie peut refléter toutes les vies, et le destin des peuples. En concentrant dans l'histoire de Willie, incarnation fulgurante de celle de Nauru les espoirs et les angoisses qui dominent le monde, Aymeric Patricot donne une traduction romanesque, pleine de souffle et de beauté, aux questions de notre temps."