La littérature sous caféine


Les artistes qui mettent en scène leurs faiblesses (Harvey Pekar, American Splendor)



J’apprends la mort de Harvey Pekar, l’auteur de la merveilleuse bandes-dessinées American Splendor (adaptée récemment au cinéma), que j’ai découverte cette année. Il en était le scénariste, racontant sa vie par courts épisodes qu’il faisait mettre en images par plusieurs dessinateurs, parmi lesquels le fameux Crumb, devenu par la suite une véritable icône de l’underground, flirtant constamment avec la vulgarité, les fantasmes sexuels et le portrait, souvent cruel, et souvent politiquement incorrect, d’ailleurs, de l’Amérique.

Ce qui m’a frappé dans cette bande-dessinée, et ce qui m’a plu, c’est que l’auteur ose se mettre en scène comme un dépressif chronique, assailli par les angoisses les plus diverses, éprouvant les pires difficultés dans sa vie professionnelle et sa vie sentimentale. Œuvre glauque ? Non, sincère, et le succès foudroyant qu’elle a rencontré ne m’étonne pas. Mécaniquement, on se sent beaucoup plus proche, en fin de compte, d’une personne avouant ses faiblesses. Et c’est bien la première fois que je lis, du moins de cette qualité, une bande-dessinée dont la force, la maturité, la gravité même des enjeux reste comparable à celles de grandes œuvres littéraires.


COMMENTAIRES

1. Le samedi 17 juillet 2010 à 22:49, par marine

so cliche, le loser dans sa voiture pourrie qui mange un burger : quel reve americain ;)

2. Le samedi 17 juillet 2010 à 23:00, par aymeric

Elle m'a bien fait poiler, moi, cette scène ! Et j'ai bien aimé la référence au film "The revenge of the Nerds", un classique US que j'avais vu pendant un séjour linguistique là-bas... :-)

3. Le jeudi 22 juillet 2010 à 01:00, par marie

Peut-être ”dépressif chronique”… je dirais aussi sincère et conscient, … et sa ”dépression” il la prend avec une certaine dose d’humour, ce qui fait toute la différence.

4. Le jeudi 22 juillet 2010 à 11:17, par aymeric

C'est vrai. Tout au moins avec un regard ironique, un regard distancié... Il suffit parfois de parler d'une chose pour ne plus en être vraiment prisonnier

5. Le mardi 27 juillet 2010 à 23:38, par marie II

(Oups ! Je me rend compte qu'il existe dèja le pseudo marie)
Je ne suis pas sûre qu'il suffit de parler, écrire sur une chose pour ne plus en être prisionner. J'aimerais bien... mais parfois il y a aussi un temps de deuil...

6. Le jeudi 29 juillet 2010 à 03:28, par aymeric

en tout cas, parler de la chose, c est comme un petit signe de victoire, c le debut de la conscience, du jeu, de l ironie, du detachement...
mais je suis d accord avec toi, et je me suis souvent pose la question: qu est ce que la conscience des choses ajoute vraiment aux choses, parfois ?

7. Le vendredi 30 juillet 2010 à 01:17, par marie II

Oui, c’est le début d’une sorte de libération !! Ecrire me permet de prendre conscience de ce qui ce passe et parfois de choisir : choisir d’en rester prisonnière ou essayer d’accepter que la vie est mystérieuse et que c’est à nous de faire le présent… J’aime bien ce que dit Marisa Monte dans une de ses chansons … le monde est une école, la vie est un cirque… (J’ai l’impression de m’égarer !!!)
Si je ne prends pas conscience de ce qui se passe j’ai l’impression d’être emportée par la vie au lieu de la conduire. Et la question se pose, faut-il tout métriser ? Non, pas tout…

8. Le vendredi 30 juillet 2010 à 12:06, par aymeric

De toutes facons, c est impossible ! Montaigne parlait du "branloir perenne" en parlant de la vie, cad de qch qui bouge en permanence... Et la sagesse consiste a accompagner le mouvement avec le plus de souplesse et de fidelite possible

9. Le samedi 31 juillet 2010 à 12:37, par marie II

C'est très beau et très juste ! , le "branloir perenne" qu'on fait bouger et qui nous emporte au même temps... :-)

10. Le samedi 31 juillet 2010 à 14:59, par mattD

Eh oh, ca va avec votre "branloir perenne" ! :-)

11. Le dimanche 1 août 2010 à 12:19, par marie II

Tu ne trouves pas séduisante cette pensée ? :-)

12. Le lundi 2 août 2010 à 06:13, par aymeric

impossible de ne pas y penser ! Sacre Montaigne !

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