La littérature sous caféine


Colette, ma bible en amour et botanique



Des années maintenant que je suis jaloux de Colette. Chacune de ses phrases m’envoûte par la richesse de son vocabulaire, son arrogante préciosité, sa connaissance vertigineuse du cœur humain, des intrigues de couple et des émotions si fortes et raffinées que nous procurent les mondes animal et végétal. Ses romans, ses chroniques relèvent souvent de cette prose poétique à côté de laquelle toute autre fiction paraît fade. Et son art du croquis psychologique et moral, ponctué de savants aphorismes sur la séduction, vaut bien celui des grands moralistes français.

J’achève tout juste ma troisième lecture de ce qui me paraît être son grand chef-d’œuvre, Le Pur et l’Impur, livre d’une certaine maturité sentimentale dans lequel elle dresse le portrait de séducteurs prestigieux et de hautes figures de l’homosexualité (féminine ou masculine). Le style, précieux, maniéré, grandiloquent par moments, peut sembler daté, mais il ne rend que plus impressionnant ce véritable petit traité du cœur humain, cette évocation poétique des hypocrisies, manipulations, faux-semblants, flamboyances de l’amour sous toutes ses formes.

Je commence à avoir une vue d’ensemble de l’œuvre – pour l’instant je n’en gardais qu’une impression touffue – et j’ai le sentiment de parvenir à réduire quelque peu le mystère qu’il représentait jusqu’à maintenant pour moi (ce qu’on appelle un chef-d’œuvre réside d’ailleurs peut-être dans une densité particulière, une complexité qui oblige à y revenir de nombreuses fois pour que les choses s’éclaircissent…)

Exemple de petit bijou littéraire, cette évocation des « êtres au sexe incertain » :

« La séduction qui émane d’un être au sexe incertain ou dissimulé est puissante. Ceux qui ne l’ont jamais subie l’assimilent au banal attrait des amours qui évincent le principal mâle. C’est une confusion grossière. Anxieux et voilé, jamais nu, l’androgyne erre, s’étonne, mendie tout bas… Son demi-pareil, l’homme, est prompt à s’effrayer, et l’abandonne. Il lui reste surtout le droit, même le devoir, de ne jamais être heureux. Jovial, c’est un monstre. Mais il traîne incurablement parmi nous sa misère de séraphin, sa lueur de larme. Il va du penchant tendre à l’adoption maternelle… » (Le pur et l’impur, Livre de poche, page 71)

COMMENTAIRES

1. Le vendredi 9 juillet 2010 à 23:28, par Panthere

Hello !

Je découvre ton blog... très intéressant. J'y reviendrai pour l'approfondir car il vaut vraiment la peine.

Belle chronique sur Colette. Encore un billet qui me donne envie de l'approfondir (aujourd'hui, une chronique chez Passouline concernant Wilde était très réussie)

Merci pour ce moment de lecture (et encore bravo pour la couv' de "Suicide Girls" que je compte bien lire et chroniquer vu le débat sur le blog de LS qui avait commencé alors même que personne ne l'avait encore lu !)

2. Le samedi 10 juillet 2010 à 13:29, par MattD

Désolé, mais la photo de Colette ne me donne pas vraiment envie de l'approfondir...
euhm euhm, pardon... :-)

3. Le samedi 10 juillet 2010 à 16:22, par aymeric

Je vois que tu lis le blog d'assouline, effectivement tres instructif le plus souvent ! (je suis impressionné par le rythme et l'ampleur de ses billets !)

4. Le mercredi 14 juillet 2010 à 15:40, par manue

c'est interressant cette relecture, de voir les memes lignes d'un nouvel oiel. la seule relecture que j'ai faite, c'etait une petite histoire dont je suis tombee amoureuse: the dream of a ridiculous man de Dostoevski (je suppose que ce serait le reve d'un homme ridicule en francais?). je l'ai tellement aimee, que je voulais la reecrire.
il faut dire, que je ne lis pratiquement pas de roman, je bouffe du dico et des traites depuis gamine. sauf pour les livres de science fiction quand j'ai besoin de m'evader. je garde les films pour me raconter des histoires.
merci de me faire decouvrir la bio de Colette, une femme qui semble bien interressante, je la garde comme un des classiques francais, a faire.

les garcons- filles comme on les appelle ici, ont un tout autre statut qu'en europe. le monde hindu ayant fait de cette curiosite, un don de dieu, comme les fous d'ailleurs. pourtant, meme ayant ce don de dieu, ils font encore le trotoire, pour la plupart. en inde, il ont meme un statut legal special, vue qu'il y en a tellement.

bonne relecture a vous Monsieur.

5. Le jeudi 15 juillet 2010 à 13:41, par aymeric

Ce que tu racontes me fait penser aux "lady-boys" qu'on voit aussi en si grand nombre en thailande... Je ne suppose que leur quotidien ne doit pas etre très rose tous les jours, malgré la grande décomplexion qu'ils affichent un peu partout

6. Le jeudi 15 juillet 2010 à 15:23, par manue

exactement. Oui, j'ai vue cela aussi en Thailande, on ne sais pas trop de quel sexe est notre serveur. une androgynie bizarre qui me rappelle trop souvent les peintures de l'enfer et du paradis de H Bosh, avec ses corps en pleine mutation.

repensant a la relecture. les messages prives, journaux intimes et autres discussions personelles, ca compte comme relecture ca? les mots prives se relisent encore et encore, chaque virgule decodees, jusqu'a ce qu'on tourne la page, et range le livre dans le tiroir des mots publics...
des mots comme des objects...

7. Le jeudi 15 juillet 2010 à 23:37, par aymeric

"le tiroir des mots publics" ?

8. Le vendredi 16 juillet 2010 à 06:22, par manue

par tiroir, je parlais des dossiers, de tous ces compartiments, dans lesquels on range les choses de la vie.
par public je pensais a l'oppose de personel?

9. Le vendredi 16 juillet 2010 à 12:52, par aymeric

a propos de cette partition privé/public, il y a aussi ce phénomène étrange qui est l'abandon des mots au public, justement: ils ne nous appartiennent plus, d'une certaine manière, on les regarde comme de petites choses étranges qui nous mettent parfois aussi mal à l'aise que s'il s'agissait des mots étranges - la fameuse expression de freud, "l"inquiétante étrangeté", conviendrait tout à fait

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