La littérature sous caféine


Les viols sages de Steinbeck (ce Faulkner en moins rageur ?)



Frappants, les points communs entre les deux américains Steinbeck et Faulkner : description des mêmes zones et des mêmes périodes où la civilisation s’efface, tension dramatique croissante vers des crimes ou des viols, parfaite maîtrise du style et puissant souffle romanesque… Seulement Steinbeck reste toujours raisonnable et privilégie la clarté, l’efficacité narrative, la petite touche d’humour et d’humanité, tandis que Faulkner gonfle son inspiration, tiraille ses phrases, enroule l’intrigue sur elle-même, veut faire dans l’anthologie pour la moindre anecdote…

Je viens de finir un roman méconnu de Steinbeck, l’auteur de Tortilla Flat ou Des Souris et des Hommes : Les Naufragés de l’Autocar. Un groupe de gentils américains vit quelques heures de grande tension lorsque leur autocar tombe en rade dans le désert. Le roman s’ouvre par quelques brillantes pages de satire, s’embourbe au milieu dans de longs dialogues souvent insipides, et se clôt notamment par un « viol conjugal » dont Steinbeck fait une courte page, alors que Faulkner nous en aurait fait 200 feuillets, plongeant avec délice dans les infinies circonvolutions de la haine (j’ai en tête les pages sublimes de Lumière d’Août)…

« Elle ouvrit les yeux et lui sourit. M. Pritchard s’étendit vivement près d’elle et, soulevant le manteau de fourrure, se glissa dessous.
- Tu es fatiguée, mon ami, dit-elle. Elliott ! que fais-tu ? Elliott !
- La ferme ! entends-tu ? La ferme ! Tu es ma femme, non ? Est-ce qu’un homme n’a aucun droit sur sa femme ?
- Elliott ! Tu deviens fou ! On va… On va nous voir !
Prise de panique, elle luttait avec lui.
- Je ne te reconnais plus ! Elliott ! tu déchires ma robe !
- Et alors ! C’est moi qui l’ai payée ! J’en ai assez d’être traité comme un chien galeux !
Bernice sanglotait sans bruit, de crainte et d’horreur.
Lorsqu’il la quitta, elle pleura encore, le visage enfoui dans son manteau de fourrure. Peu à peu, ses larmes se calmèrent, elle se mit sur son séant et regarda vers l’entrée de la grotte. Ses yeux brillaient farouchement. Elle leva la main et posa ses ongles sur sa joue. Pour voir, elle les fit d’abord glisser une fois jusqu’à son menton, puis, se mordant la lèvre, elle se laboura la joue de haut en bas. Le sang suinta des égratignures. Elle tendis la min vers le sol, la souilla contre la terre et frotta ensuite la voue contre sa joue sanglante. Le sang filtra à travers la boue, ruissela le long de son cou et sur le col de sa blouse.
» (p342)

COMMENTAIRES

1. Le mercredi 13 juin 2007 à 10:16, par lila

Merci pour cette fenêtre ouverte sur la littérature américaine et cette très fine analyse de l'écriture de Steinbeck. Ce blog est en train de devenir mon quotidien littéraire. Vous suscitez en moi un grand désir de lecture Mister Pat... Mais tant de livres et si peu de temps ! je pensais avoir le loisir de dévorer cet été mais en fait non, la vie en a décicé autrement...

2. Le mercredi 13 juin 2007 à 11:28, par aimée

avec toutes ces comparaisons entre Steinbeck et Faulkner auriez vous une légère préférence ?, un des deux styles d'écritures auquel vous etes peut etre plus sensible .
Je ne connais pas Faulkner mais je sais que trois livres de Steinbeck ont été adapté au cinéma et qu'à parament ce sont de vrai chef d'oeuvres ( les livres et les films ) dont "mice and men " que vous avez sité, il faudrais vraiment que je les lisent :) ...

PS : Et si vous avez déjà lu des livres de Marc Lévy peut etre que vous pourrez me donnez quelques uns de vos avis ?




3. Le mercredi 13 juin 2007 à 11:58, par DeYeR

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c'est un petit cadeau, j'ai enfin réussi à bien l'encodé !!!

J'espert à bientôt

Edouard, (le caméraman de Strictement confidentiel)

PS : Je t'envérais le lien de mon site photos bientôt j'espert ;)

4. Le mercredi 13 juin 2007 à 12:59, par mister pat

c'est le pb le plus aigu concernant la littérature : le manque de temps !! (au moins pour un film c'est réglé en 2h... C'est bcp plus facile d'etre cinéphile finalement !! Un livre c'est plutot 10 h en moyenne...)

Il vaut mieux commencer par Steinbeck, incontestablement plus abordable ! quant à marc levy, disons que ce n'est pas encore un classique... Si tu as du temps à perdre cet été pour bouquiner, plonge toi plutot dans nos deux américains !!

Merci Edouard ! Le lien ne marche pas (du moins pour moi)... Je le remettrai dans un prochain billet... Montre nous vite tes photos !

5. Le jeudi 21 juin 2007 à 17:03, par DeYeR

lol c'était pas un lien, mais le code source de la vidéo pour que tu puisse la mettre sur ton blog ;)

t'a qu'a faire un copi/colle quand tu fait un article, en mode HTML ou alors mode Code Source ;)

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