"Le bonheur tient à si peu..." (Les vies enchantées, enquête sur le bonheur - La Montagne)
Par admin, lundi 7 mars 2016 à 11:25 :: "Les vies enchantées" (2016) :: #823 :: rss
"Le casting fait tout le charme de ce petit guide du bonheur pas tout à fait consensuel, pas du tout mièvre et surtout pragmatique. Une potentielle source d’inspiration. Et si jamais le bonheur se révélait contagieux, qui sait…
Le constat est rude. «On a un moi très limité. On ne comprend pas tout. On meurt assez vite ». Le drame immémorial de la condition humaine. Aymeric Patricot le jure, il n’avait jamais lu les divers traités publiés sur le bonheur ou multiples manuels de développement personnel. Pas envie de se laisser «phagocyter ».
Pour aborder la question ressassée du bonheur, ce professeur de lettres à Troyes, agrégé, la jeune quarantaine, est allé tout simplement à la pêche aux gens heureux, qu’ils soient restés tenaces dans sa mémoire ou irradient son quotidien. «Avec ce bouquin, j’ai essayé de fabriquer une théorie du bonheur », confie l’auteur des Vies enchantées, enquête sur le bonheur (éditions Plein Jour).
«Ils ont un côté obsessionnel. »
Au commencement, sa «surprise» comme facteur déclenchant de l’écriture. «Je n’imaginais pas qu’on puisse être heureux ainsi ». Il pense notamment à ce gars croisé il y a vingt ans, à qui il consacre un long chapitre intitulé :«Le baiseur ». Il trouvait sa félicité dans le «sexe immédiat », décomplexé et butineur. «Il avait un côté un peu fou, un peu maniaque aussi. La plupart de mes personnages ont ce côté obsessionnel. Ils vont au bout d’une sorte de délire. On n’est pas dans le côté serein, bouddhiste à la Frédéric Lenoir, mais plutôt dans la folie douce ».
Il y a ce collègue qui entasse et classe compulsivement ses livres jusqu’à tapisser son plafond, cette femme qui a misé toute sa vie sur sa forte poitrine, cette autre qui oublie ses cheveux gris dans la contemplation de son jardin. Ou encore ce père de famille pour qui «le bonheur est une discipline » et une obligation paternelle.
Aymeric Patricot s’est toujours méfié des gens qui se disent heureux. Toujours suspects en plus d’être passablement agaçants.Sans compter leur légère tendance à se la raconter, à «en imposer aux autres et à se mentir à eux-mêmes ». Alors il leur a préféré ceux qui «donnent l’impression d’être heureux », et a cherché à extirper de leur vie la recette de cette béatitude renouvelée. Sans les interviewer. Il les observe parfois comme des objets curieux, mais sans jugement. Lui revendique un petit côté Schopenhauer, pas franchement connu pour son optimisme à toute épreuve. Mais cette idée négative que le bonheur n’est rien d’autre qu’une absence de malheur lui parle. Toutefois, il se dit bien moins pessimiste. «Pour ma part, je pense qu’il est parfaitement possible d’être heureux si on entretient une part d’illusion. J’ai une vision assez ludique des choses. L’idée, c’est d’oublier notre finitude ».
«O nsublime, on s’excite de petites choses. On est dans la folie douce »
Ce que réussissent à merveille ses personnages. Pas parce qu’ils manquent de lucidité, au contraire, mais parce qu’ils parviennent à «trouver une astuce pour la surmonter ». Ils ne sont pas seulement dans le trip «Profitons du café qu’on boit, là maintenant », mais dans l’exaltation. «Regardez la femme au jardin, elle ne se contente pas d’admirer les petites fleurs. On n’est pas dans un hédonisme cool. Non, on sublime, on s’excite de petites choses ».
Au milieu des anonymes, l’auteur invoque quelques écrivains. Dont Colette. «J’en suis jaloux. J’aurais aimé être elle. Elle va à fond ». Mais, au fait, est-il un homme heureux ? «Disons que j’ai réussi à identifier ce qui pourrait me rendre heureux, ce qui n’est pas le cas de tout le monde. Mais il me faut juste éliminer encore une ou deux choses dans ma vie pour y parvenir ». L’Homme, cet éternel insatisfait, toujours quelque chose qui cloche… Comme l’écrivait Jules Renard, «si l’on bâtissait la maison du bonheur, la plus grande pièce en serait la salle d’attente »."
Florence Chedotal, pour La Montagne.
Le constat est rude. «On a un moi très limité. On ne comprend pas tout. On meurt assez vite ». Le drame immémorial de la condition humaine. Aymeric Patricot le jure, il n’avait jamais lu les divers traités publiés sur le bonheur ou multiples manuels de développement personnel. Pas envie de se laisser «phagocyter ».
Pour aborder la question ressassée du bonheur, ce professeur de lettres à Troyes, agrégé, la jeune quarantaine, est allé tout simplement à la pêche aux gens heureux, qu’ils soient restés tenaces dans sa mémoire ou irradient son quotidien. «Avec ce bouquin, j’ai essayé de fabriquer une théorie du bonheur », confie l’auteur des Vies enchantées, enquête sur le bonheur (éditions Plein Jour).
«Ils ont un côté obsessionnel. »
Au commencement, sa «surprise» comme facteur déclenchant de l’écriture. «Je n’imaginais pas qu’on puisse être heureux ainsi ». Il pense notamment à ce gars croisé il y a vingt ans, à qui il consacre un long chapitre intitulé :«Le baiseur ». Il trouvait sa félicité dans le «sexe immédiat », décomplexé et butineur. «Il avait un côté un peu fou, un peu maniaque aussi. La plupart de mes personnages ont ce côté obsessionnel. Ils vont au bout d’une sorte de délire. On n’est pas dans le côté serein, bouddhiste à la Frédéric Lenoir, mais plutôt dans la folie douce ».
Il y a ce collègue qui entasse et classe compulsivement ses livres jusqu’à tapisser son plafond, cette femme qui a misé toute sa vie sur sa forte poitrine, cette autre qui oublie ses cheveux gris dans la contemplation de son jardin. Ou encore ce père de famille pour qui «le bonheur est une discipline » et une obligation paternelle.
Aymeric Patricot s’est toujours méfié des gens qui se disent heureux. Toujours suspects en plus d’être passablement agaçants.Sans compter leur légère tendance à se la raconter, à «en imposer aux autres et à se mentir à eux-mêmes ». Alors il leur a préféré ceux qui «donnent l’impression d’être heureux », et a cherché à extirper de leur vie la recette de cette béatitude renouvelée. Sans les interviewer. Il les observe parfois comme des objets curieux, mais sans jugement. Lui revendique un petit côté Schopenhauer, pas franchement connu pour son optimisme à toute épreuve. Mais cette idée négative que le bonheur n’est rien d’autre qu’une absence de malheur lui parle. Toutefois, il se dit bien moins pessimiste. «Pour ma part, je pense qu’il est parfaitement possible d’être heureux si on entretient une part d’illusion. J’ai une vision assez ludique des choses. L’idée, c’est d’oublier notre finitude ».
«O nsublime, on s’excite de petites choses. On est dans la folie douce »
Ce que réussissent à merveille ses personnages. Pas parce qu’ils manquent de lucidité, au contraire, mais parce qu’ils parviennent à «trouver une astuce pour la surmonter ». Ils ne sont pas seulement dans le trip «Profitons du café qu’on boit, là maintenant », mais dans l’exaltation. «Regardez la femme au jardin, elle ne se contente pas d’admirer les petites fleurs. On n’est pas dans un hédonisme cool. Non, on sublime, on s’excite de petites choses ».
Au milieu des anonymes, l’auteur invoque quelques écrivains. Dont Colette. «J’en suis jaloux. J’aurais aimé être elle. Elle va à fond ». Mais, au fait, est-il un homme heureux ? «Disons que j’ai réussi à identifier ce qui pourrait me rendre heureux, ce qui n’est pas le cas de tout le monde. Mais il me faut juste éliminer encore une ou deux choses dans ma vie pour y parvenir ». L’Homme, cet éternel insatisfait, toujours quelque chose qui cloche… Comme l’écrivait Jules Renard, «si l’on bâtissait la maison du bonheur, la plus grande pièce en serait la salle d’attente »."
Florence Chedotal, pour La Montagne.
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