La littérature sous caféine


Violences faites aux femmes : le déni ? (Viol en littérature et affaire DSK)


J.F Kahn : imprudence ou viol de DSK par pensetouseul

L'affaire DSK me paraît assez révélatrice du traitement que la société française réserve, en général, au thème du viol. Cela fait quelques années maintenant que je me penche sur la question, notamment par le biais de la fiction. Azima la rouge et Suicide Girls en traitaient de manière très instinctive, sans élaborer de théorie ni faire de morale. Il s'agissait de réfléchir à la notion de traumatisme, le viol représentant une sorte d'archétype de toutes les violences possibles. Et j'ai souvent été frappé par le mouvement de répulsion que provoquait ce genre de littérature : "Pourquoi donc écrire là-dessus ? / Le thème ne m'intéresse pas ! / Ecris donc des choses joyeuses ! / Nous n'avons pas envie de publier des articles sur un livre de cette catégorie-là."

J'étais surtout surpris de remarquer ces réactions chez des femmes, en majorité, alors que je m'étais attendu à ce qu'elles constituent un public privilégié. Les rares qui ont lu et aimé Suicide Girls m'ont semblé être des personnes qui avaient été touchées, de près ou de loin, par de telles choses, ou qui s'y étaient déjà intéressées. Et je me suis souvent donné l'impression d'être moi-même plus féministe que la plupart des femmes dans la mesure où j'éprouvais davantage de compassion, davantage de révolte face à la réalité d'une certaine condition féminine.

(On peut imaginer, bien sûr, des hypothèses à ce mouvement de répulsion : sujet sensible entre tous, fatalisme, caractère insupportable de certains faits que l'on sait pouvoir nous concerner...)

C'est le même genre de mouvement que je crois pouvoir observer dans l'affaire DSK. Sans vouloir bien sûr préjuger de la suite des événements, il est d'ores et déjà frappant de voir combien la question de la victime est évacuée. On ne la voit pas, mais surtout on ne veut sans doute pas la voir. Le vrai traumatisme, pour l'opinion publique et la classe politique, c'est de se rendre compte qu'il existait peut-être une autre réalité derrière la façade prestigieuse. Cela dérange tous les plans. Il est tellement plus facile, tellement plus confortable de s'en tenir à ce que l'on croyait être la réalité de DSK ! On hésite entre reconnaître la souffrance de la victime et préserver sa jolie vision des choses. Mais on n'hésite pas longtemps, en fait. A moins que les faits nous obligent un jour, par leur étalage éclatant sur la voie publique, à reconsidérer le paysage.

(Non pas que le public et la classe politique refusent de voir une réalité dont nous ne savons même pas encore si elle existe... Mais ils souffrent d'avance à l'idée qu'une réalité de cet ordre puisse éclater).

COMMENTAIRES

1. Le mercredi 18 mai 2011 à 12:24, par mathieu

les propos de jean françois kahn sont insupportables

2. Le jeudi 19 mai 2011 à 16:53, par gustave

Le public - dont je suis - éprouve un sentiment d'horreur face au monstre qui se révèle sous DSK. Et, pour ainsi, dire, le révélateur de cette monstruosité - cette femme qui en a fait les frais et je suis de tout coeur à ses côtés - est responsable d'une chose : avoir levé le voile. Et beaucoup, inconsciemment, ne peuvent tolérer s'être ainsi laissés abuser par cette abomination. La victime qui révèle est donc, elle aussi, intolérable. Pour ma part, je suis pleinement du côté de la victime.

3. Le vendredi 20 mai 2011 à 07:47, par aymeric

Ce qui est terrible pour elle (en faisant l'hypothèse qu'elle est bien coupable) c'est la véritable double peine à laquelle elle se soumet elle-même en ayant le courage de porter plainte : les avocats de DSK s'apprêtent à dépecer littéralement sa vie passée... Seconde peine plus terrible encore que la première, sous de nombreux aspects

4. Le vendredi 20 mai 2011 à 10:49, par gustave

A la réflexion, si les faits sont avérés, il n'est pas étonnant qu'un homme, à la tête d'une institution qui est un emblème du capitalisme, mime les dérives de ce même système : un consommateur acharné de chair humaine.
Quant à Jean-François Kahn, voilà une parole infâme qu'il risque de traîner longtemps.
Enfin, oui, je vous rejoins sur le fait que cette femme va devoir subir une seconde violation de son intimité. Les personnages publics y sont rompus. Pas les anonymes. Elle peut en sortir anéantie.

5. Le samedi 21 mai 2011 à 12:49, par aymeric

C'est exactement ça: elle n'est pas rompue aux phénomènes de tempête médiatique... Les armes ne sont pas égales, à tous points de vue. C'est assez effrayant

6. Le mardi 24 mai 2011 à 11:14, par Hélène

J’en suis arrivée au stade où je pense que le combat féministe doit être l'affaire des hommes, parce que, par définition, la parole des femmes ne sera pas entendue (« la société » n’est pas prête à l’entendre)

Toute « la société » est formatée sur un modèle masculin .

Reste à savoir ce que souhaitent les hommes face à cette moitié de l’humanité : quel type de partenaire souhaitez vous ? quel type de relation voulez vous avoir ? N’en n’avez-vous pas marre d’être réduit à ce cliché de « mec », dominateur, « pensant avec leur bite ».

J’aimerai que la majorité silencieuse des hommes s’expriment.

Aujourd’hui le sexisme est insidieux , caché, voilé, émis par des hommes n’hésitant pas à se dire également féministe et c’est encore plus difficile à combattre. J’en viens à préférer les « bon gros machistes » au moins c’est clair.

La réaction des femmes relève de ce phénomène insidieux , du formatage depuis la plus tendre enfance imposé à tous les niveaux de la société : se faire siffler dans la rue c’est « gratifiant », entendre régulièrement dans les médias des commentaires sur le physique des femmes (qu’elles soient actrices, femmes de pouvoir .etc..) et rarement sur les hommes « ce n’est pas grave » , relayer l’idée que la prostitution est un choix c’est « une idée comme une autre » (le scandaleux billet de Caubère est resté assez peu commenté, je trouve) ; et puis tant qu’on y est : ne pas se défendre par sidération quand quelqu’un vous impose violence, cela veut dire qu’on est consentant…

Moi, je n’en peux plus, depuis mes 20 ans , je trouve que les choses ont régressé et je suis parfois effrayée par les « jeunes générations »: je me contente d’une ironie mordante et désabusée face ce machisme soft mais je n’ai pu l’énergie de me battre : c’est peut être cela l’inertie, l’évitement que tu constates chez les femmes (les miens du moins) : la fatigue générée par la certitude de ne pas être entendue….

Bon j’arrête, car en vérité c’est un des rares thèmes qui peut me mettre dans une grande colère (et ce commentaire décousu le démontre.. :-s).

7. Le mardi 24 mai 2011 à 11:36, par aymeric

d'accord avec ce que tu dis, dans l'ensemble... Je pense qu'on assiste à de vraies régressions. J'ai le sentiment, de toutes manières, que les choses ont très peu évolué. Il faudrait effectivement plus d'hommes féministes.
Cependant j'aimerais préciser que je me sens souvent plus féministe que la plupart des femmes elles-mêmes... Il y a peu d'hommes féministes, mais le vrai pb me semble-t-il est qu'il y a peu de féministes chez les femmes. Le système est tenu par les hommes, dis tu, mais la plupart des femmes jouent le jeu de ce système. J'aimerais d'ailleurs écrire un livre là-dessus: en tant qu'homme, il m'est arrivé de souffrir du fait que les femmes reproduisent tellement les pires clichés sexistes. (il existe des pages cinglantes de Yourcenar sur ce thème : la déception que les femmes lui causent)

8. Le mardi 24 mai 2011 à 11:39, par aymeric

a propos de l'affaire dsk, les femmes n'ont ainsi pas été moins nombreuses que les hommes à jeter le doute sur le témoignage de la victime... La défense des femmes est décidément une question universelle, qui dépasse le simple clivage hommes-femmes, curieusement (pour le dire plus simplement: les femmes n'ont pas le monopole de la défense des femmes)

9. Le mardi 24 mai 2011 à 15:40, par Hélène

C'est vrai que les pires reflexions machistes que j'ai entendues (enfin , peut être pas les pires mais celles qui m'ont le plus choquée) émanaient de femmes....
10 000 d'histoire et de représentation sexuelle à purger, y' a du boulot..

Sur DSK , j'ai eu aussi un énorme doute dans les premières heures (pas longtemps il est vrai) mais surtout parce que cela avait lieu aux USA, les mêmes faits en France ne m'aurait pas fait hésiter .


Donc peut être la réaction française, loin de devoir être assimilée à un laxisme tendancieux, doit elle être être lue au regard de l'aspect géographique des évenements

10. Le mardi 24 mai 2011 à 19:53, par aymeric

et pourquoi le fait que les événements se soient passés aux USA les rend-il plus douteux ?

11. Le mercredi 25 mai 2011 à 10:01, par Hélène

Parce que , ayant vécu une petite année là bas, je sais que tu peux te trouver embarqué dans des ennuis judicaires pour des choses qui semblent hors de proportion ici , d’où mon instant de doute (tant que je ne pas connu les faits) .


En matière de mœurs, ce qui est moralement condamnable chez nous peut être systématiquement judiciarisé là bas (je ne sais si c’est un bien ou un mal : mais c’est un fait). Quand j’y étais, on m’avait « briefé » en tant que Française sur un certain nombre de points qui pouvaient être mal interprétés et dériver vers des problématiques susceptibles d’être judiciarisées. Sans être parano, ce qui relève de la justice là bas n’en relève pas forcement içi .

12. Le mercredi 25 mai 2011 à 12:56, par aymeric

Ils t'avaient briefé sur quoi, exactement ?
J'ai été frappé, pour ma part, par le comportement des policiers sur les routes: une infraction mineure vous vaudra très vite les mains la sirène, les mains sur le capot, le revolver sorti de l'étui... Ca paraît complètement disproportionné (mais cela s'explique sans doute par la plus grande présence des armes)

Une phrase-clé du quotidien des américains me semble être : THIS IS THE LAW ! Ils sont obsédés par l'appllcation de la loi, alors que les Français auront toujours un malin plaisir à jouer les anars...
(on pourrait aussi évoquer leur incroyable goût, au cinéma, pour les procès et les réflexions sur la justice. En France, on préfère parler d'amour et d'art de vivre)

13. Le mercredi 25 mai 2011 à 12:58, par aymeric

quant à la judiciarisation, j'ai bien l'impression qu'elle est en train de débarquer en force en France... J'aurais plutôt tendance à m'en effrayer, même si elle doit présenter des avantages, malgré tout. Je n'arrive pas à me faire une opinion à ce propos

14. Le mercredi 25 mai 2011 à 14:48, par Hélène

Sur ma tenue vestimentaire , sur mes éventuels reflexes tactiles avec les gens, sur les formes d'humour qu'on peut avoir susceptibles d'être mal perçues ou discriminantes, sur la nécessite d’envelopper les canettes de bière bues sur la voie publique et, effectivement sur l'arrestation en voiture ; on m’avait même mise en garde sur le contact avec la douane (le français qui ne peut s’empêcher de vanner et se retrouve en tôle..); ..etc.. Comme , d'une manière générale et sans être briefée , je sais me tenir , surtout a l'étranger, ça a été, mais j'ai quand même eu quelques surprise (notamment au volant avec les limitations de vitesse ) et prenais exprès un accent hyper french (avec sourire adéquat)quand j'étais "limite" , j'étais alors excusée (à l'époque, ils aimaient les français(es)..).
La judiciarisation a en effet augmenté en France (et parfois ce n'est pas plus mal) mais pas dans les mêmes proportions (dans le domaine médicale, là bas , c'est effarant).

15. Le mercredi 25 mai 2011 à 20:28, par aymeric

je trouve que dans le domaine médiatique, beaucoup de chroniqueurs, bcp de journalistes, bcp d'essayistes prennent un ton de petits procureurs, et je trouve ca très oppressant. Je ne sais pas si c'est une tendance de l'époque - je pense cependant que cela a toujours existé au 20ème en France. Je déteste cette manière de se retrancher derrière la loi, de prendre le prétexte de grands principes abstraits pour abattre ses ennemis
Aucun progrès en la matière depuis Le Tartuffe de Molière et j'ai bien peur que la judiciarisation à l'américaine ne fasse qu'amplifier le phénomène...
Cette brutalité procédurière permet elle vraiment une avancée des moeurs ?

16. Le samedi 11 juin 2011 à 21:54, par franck

collusion DSK - JFK / cousins - cousines, ils se connaissent tous, l'un est le parrain de l'enfant de l'autre, ils se tiennent tous, JFk a certes commis une maladresse mais maladresse qui venait de tres profond - il ne s'est meme pas rendu compte qu'il défendait ses amis, croyant faire une remarque fine

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