La littérature sous caféine


Les désarrois du professeur en ZEP

Dans l'édition du samedi 14 avril du monde, un article de Mattea Battaglia à propos d'Autoportrait du professeur... dans la rubrique Le livre du jour (en ligne ICI).

"On ne compte plus les témoignages de jeunes professeurs meurtris par les conditions de leur "prise de fonctions" - ces "bleus" qui vivent dans leur chair l'écart entre un concours d'élite et le niveau du travail demandé en classe. La réforme dite de la "mastérisation", entrée en vigueur en 2010, a exacerbé le malaise, privant ces enseignants débutants de leur année de stage.

Internet, depuis plusieurs mois, s'est fait l'écho de leur désarroi : sur les blogs et les forums de discussion, la parole des enseignants se libère, pointant la difficile transition entre la formation et le terrain.

C'est ce passage, cette mise à l'épreuve que raconte Aymeric Patricot, agrégé de lettres modernes, débarqué, en 2003, dans une banlieue parisienne dont il ignorait tout - ou presque.

Le jeune homme de 29 ans, originaire du Havre, va assurer durant trois années des remplacements - de deux à trois mois - dans des collèges et lycées. Là, il se confronte à ces "zones sensibles" auxquelles, dit-il, ni les médias ni surtout l'institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) ne l'ont préparé.

Première destination : Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), ses barres HLM où plane le souvenir de la jeune Sohane, brûlée vive dans le local à poubelles de sa cité... à quelques centaines de mètres de l'établissement où il est affecté. Et premier conseil asséné par la principale : "Votre travail consiste à tenir vos classes, autant qu'il vous est possible." Quid de la transmission des savoirs ?

VIOLENCE MORALE ET PHYSIQUE

Le jeune homme s'interroge sur un métier qu'il doit, chaque jour, improviser, où la violence - morale et physique - le dispute à l'épuisement. "Je crois pouvoir affirmer qu'il existe deux métiers, écrit-il, dans les collèges favorisés, l'enseignant transmet des connaissances, identifie les progrès à faire, exerce les élèves ; dans les défavorisés, il contient la violence (...) et s'estime heureux lorsqu'il fait apprendre, pendant l'année scolaire, quelques maigres notions comme le présent de l'indicatif..." On ne sait s'il éprouve de l'admiration ou de la compassion, sans doute les deux, face à cette frange de professeurs qui cultive l'abnégation - "ces personnes aux épaules voûtées, rasant les murs, les joues creuses et tirant nerveusement sur une cigarette à la moindre pause, ces personnes que j'avais pour fonction de remplacer, précisément"...

Il est sévère à l'égard de l'institution, le ministère, l'administration, les politiques qui laissent les enseignants aller au casse-pipe. Aymeric Patricot est tout aussi intraitable pour lui-même, ou pour le "débutant" qu'il a été : manque d'autorité, recours à la menace et à l'exclusion... "Je me suis imaginé donner des coups." Il insiste sur la "mauvaise conscience" du professeur en zone d'éducation prioritaire (ZEP), qui n'ose plus se plaindre d'élèves cumulant déjà toutes les difficultés.

Admettre le désespoir n'est pas nécessairement signe d'échec. L'auteur évoque aussi des "expériences lumineuses", l'orgueil de former les adultes de demain, la joie de se confronter à cette "pâte humaine" pas encore formatée par l'idéologie et la morale. La spontanéité contagieuse des adolescents, leur enthousiasme pour Molière, Corneille, Maupassant. Les talents qui se révèlent. Selon une enquête menée par la Société des agrégés, plus de 45 % des professeurs du secondaire ont un jour songé à démissionner.

Aymeric Patricot n'en fait pas partie, mais il a tourné la page des remplacements il y a trois ans pour enseigner en poste fixe dans un lycée de La Courneuve (Seine-Saint-Denis). "Les classes deviennent gérables (...). C'est que les éléments les plus brutaux n'y accèdent pas, et même parfois quittent le système", note-t-il, sans langue de bois.

Autoportrait du professeur en territoire difficile, Aymeric Patricot, Gallimard, 113 p., 9,50 €

Mattea Battaglia
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COMMENTAIRES

1. Le mardi 17 mai 2011 à 08:28, par Paul Sunderland

Ne restez pas dans l'enseignement, c'est devenu une mafia, une désolation (je sais de quoi je parle)...
Mais lisez mon blog à deux balles (oui: pub éhontée): cielsunderland.blogspot.com/
Cordialement,

2. Le mardi 17 mai 2011 à 20:04, par aymeric

Une mafia ! Qu'est-ce qui vous fait dire ça ? :)

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