lundi 8 janvier 2024
Par admin,
lundi 8 janvier 2024 à 16:46 :: Littérature française
A ma relecture des « Trois Mousquetaires », j’ai été déçu par la description du siège de La Rochelle. En revanche, j’ai été sidéré par le personnage de Milady, qui me paraît la figure inversée de Monte Cristo : elle n’est plus le génie du bien mais le génie du mal, consumée par une envie d’en découdre qui lui insuffle des moyens extraordinaires. Comme le Comte, elle est emprisonnée. Comme le Comte, elle s’en sort par des moyens sophistiqués qui confèrent aux chapitres en question, clou de la deuxième moitié du roman, une intensité particulière.
C’est dire comme j’attends avec impatience la sortie du deuxième volet au cinéma. Rendra-t-il vraiment justice à ces chapitres ? Sans parler de la mort de Milady elle-même… Moment bref mais marquant la clôture d’une belle montée de tension.
Quoi qu’il en soit, je suis heureux que vive le leg d’Alexandre Dumas. Je viens d’ailleurs de visiter sa maison d’enfance à deux pas de la Cité internationale de la langue française. Pas de trace de Milady dans cette modeste demeure, mais de beaux cartons sur les trois Alexandre de la famille, figures aussi romanesques que les personnages issus de leur infernale imagination
aucun commentaire
samedi 30 décembre 2023
Par admin,
samedi 30 décembre 2023 à 15:02 :: Littérature française
André Breton se serait régalé à parcourir les allées du Frissons Festival, à Reims. Dans ce haut lieu du bizarre, il y a cent candidats pour une future édition de l’« Anthologie de l’humour noir », cent figures attachantes et folles, souvent cabossées, toujours riantes sous la cape d’épouvante, prêtes à titiller les confins de l’existence.
Ici, sous ses airs patelins, l’un des maîtres de l’horreur à la française, Brice Tarvel alias François Sarkel, auteur par exemple d’un titre phare de la collection « Gore » éditée par Fleuve Noir dans les années 80, « La chair sous les ongles ». La dédicace m’a fait rire : « Pour Aymeric, ces quelques recettes de cuisine… » Breton avait raison, les rires profonds s’accommodent des pulsions de révolte.
aucun commentaire
Par admin,
samedi 30 décembre 2023 à 14:58 :: Littérature française
J'aime tout ce qui fait vivre l'âge d'or de l'imaginaire français. Verne, Dumas, Leroux... Fantômas, Lupin, Musidora... Toute une constellation de fantômes, de mystères, de vaisseaux, d'aventures... Un monde entier d'amusement et d'intensité que la bd franco -belge a su renouveler et qui s'agite encore aujourd'hui, par exemple avec la nouvelle adaptation des "Trois Mousquetaires". Non, la France n'est pas le seul pays des valeurs et de l'amour. Elle est aussi celui du rêve et du panache ! Du moins, elle l'a été jusqu'à ce qu'une certaine morosité gagne à peu près tout.
Alors, toute tentative de résurrection, mieux, toute énergie créative dans cette veine-là me réjouit. C'est dire comme la publication de "La vie secrète de Sarah Bernhardt" m'enthousiasme. Un format de feuilleton pour une fiction rondement menée, précisément ancrée dans le coeur incandescent du merveilleux français. La jeune actrice aux prises avec des spectres, des nonnes vengeresses, des intrigues échevelées, joliment croquée par Gilles Verdiani et mise en image par le malicieux Franck Biancarelli, aux éditions Musidora. Longue vie à cette jeune héroïne de 150 ans !
aucun commentaire
mercredi 20 décembre 2023
Par admin,
mercredi 20 décembre 2023 à 17:03 :: Littérature française
Le fait que « Guerre » de Céline soit un premier jet m’a gêné. Même dans les passages d’anthologie, on trouve des mots qu’il n’a jamais utilisés, des répétitions, des phrases incohérentes… Le livre est court, il pourrait constituer un chapitre de « Mort à crédit ». Mais il est curieusement structuré autour d’une péripétie particulièrement efficace, si bien ficelée qu’on croirait l’auteur cornaqué par son éditeur – une histoire de mac trahi par sa poule. De ce texte, je garderai en tête la prestation hallucinée de Benjamin Voisin au Festival d’Avignon, et les portraits de quelques vicieux croustillants.
"De mon oreille on ne parlait jamais, c'était comme l'atrocité allemande, des choses pas acceptables, pas solubles, douteuses, pas convenables en somme, qui mettaient en peine la conception de remédiabilité de toutes choses de ce monde. J'étais trop malade, j'étais pas assez instruit surtout à l'époque pour déterminer dessus de ma tête très bourdonneuse l'ignominie dans leur comportement à mes vieux et à tous les espoirs, mais je sentais ça sur moi à chaque geste, chaque fois que je vais mal, comme une pieuvre bien gluante et lourde comme la merde (...)" (page 107
aucun commentaire
mardi 19 décembre 2023
Par admin,
mardi 19 décembre 2023 à 08:34 :: Littérature française
Etienne Ruhaud se passionne pour le surréalisme, et son recueil « Animaux » (2020) me paraît surréaliste de bout en bout. Trente poèmes en prose décrivant avec la précision distanciée de Ponge des créatures imaginaires, souvent horrifiques, en tout cas étranges, affublées de noms dont on connaît le sens ou créés de toute pièce – Henri Michaux n’aurait pas renié ces hallucinations, ces mondes arbitraires. Saisir ses cauchemars avec rigueur, assumer ses fantasmes bizarres… André Breton, sort de ce corps !
« Les baignoires
Des bassins circulaires, au fond des abysses, et dont les bords sont constitués d’écailles mauves, grandes comme la main, dures comme le roc.
Les baignoires sont emplies d’un liquide organique couleur rouille, pareil à de l’eau ferrugineuse. Attirés par l’odeur, poissons, coquillages et crustacés sont électrocutés, puis aspirés vers la bouche, trou noir et rond, au centre. L’estomac digère chair, arêtes, carapaces et coquilles. Les excréments sont ensuite rejetés au loin par le cloaque, et consommés par des crabes microscopiques. (…) »
aucun commentaire
lundi 11 décembre 2023
Par admin,
lundi 11 décembre 2023 à 16:09 :: Littérature française
Dans un petit livre de beau papier, sobrement intitulé « Sirletti », imprimé de huit reproductions de tableaux en couleurs, Fabrice Pataut rend hommage au peintre disparu Roland Sirletti, ou plutôt aux échos de son œuvre dans son propre imaginaire. J’aime ce genre de témoignage d’amitié dense, étiré dans le temps, cristallisé dans une sorte d’œuvre seconde et parallèle, d’autant que l’écriture en est mystérieuse et précise, proposant à la fois des éléments d’expérience personnelle et de réflexion sur le sens de l’art. Cent-cinquante grammes d’amitié sublimée !
aucun commentaire
mercredi 29 novembre 2023
Par admin,
mercredi 29 novembre 2023 à 10:40 :: Littérature française
En lisant l'œuvre complète de François Villon, je comprends mieux le culte autour de son œuvre. Il faut vraiment quitter le terrain trop balisé de la Ballade des pendus, pourtant déjà virile, pour aller se perdre dans les allées mal famées de ses autres poèmes. « La ballade de Villon et de la grosse Margot », par exemple, paraît annoncer quelque chose de Rabelais, du romantisme gothique et même du punk qui sévira cinq siècles plus tard, même si l'on frémit à l'idée que les censeurs d'aujourd'hui puissent trouver matière à la faire interdire...
« (…) Puis, on fait la paix, et elle me lâche un gros pet
Plus enflé qu’un bousier venimeux.
Pour rire, elle m’assène son poing sur le crâne :
« Allez ! », dit-elle en me donnant un coup sur la cuisse.
Puis, ivres tous les deux, on dort comme une toupie.
Au réveil, quand son ventre gargouille,
Elle monte sur moi, pour protéger son fruit.
Je gémis sous elle, en me faisant plus mince qu’une planche.
Elle me tue à force de paillarder,
Dans ce bordel où nous tenons boutique. » (traduit en français moderne)
aucun commentaire
mardi 14 novembre 2023
Par admin,
mardi 14 novembre 2023 à 15:58 :: Littérature française
Je relis « Mort à Crédit » (1936) avant de me lancer dans les trois volumes de Céline récemment édités et je dois dire que je préfère, contrairement à certains puristes, le « Voyage… » (1932) La matière de « Mort à crédit » m’a moins passionné. Ces histoires de jeunesse laborieuse, de séjour en Angleterre et de savant fou m’ont paru longuettes. Bien sûr, le style est ébouriffant (je ne vois pas de différence notable par rapport au « Voyage »), notamment dans quelques scènes de coït halluciné – le sexe est vraiment pour Céline le pendant de la guerre, son versant jouissif, sa récompense, une façon de rattraper dans l’extase le mal que le monde vous inflige. On dirait que Ferdinand s’accroche à cette chose pour bien y racler le moindre rogaton de plaisir, fût-il absurde, fût-il grimaçant.
« J’entends un petit pas léger… un glissement… c’est elle ! un souffle ! Je suis fait Bonnard !... Je pouvais plus calter !... Elle attend pas ! Elle me paume en trombe, d’un seul élan sur le page ! C’est bien ça !... Je prends tout le choc dans la membrure ! Je me trouve étreint dans l’élan !... congestionné, raplati sous les caresses… Je suis trituré, je n’existe plus… C’est elle, toute la masse qui me fond sur la pêche… ça glue… J’ai la bouille coincée, j’étrangle… Je proteste… j’implore… J’ai peur de gueuler trop fort… Le vieux peut entendre !... Je me révulte… Je veux me dégager par-dessous !... Je me recroqueville… j’arc-boute ! »
aucun commentaire
< 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 >