Marin de Viry - La littérature française... par college-des-bernardins

Pour clore cette saison 2010-2011, et avant de laisser ce blog en friche pendant deux mois, je reproduis ici quelques extraits du bel article de Marin de Viry (cinq pages), à propos d'Autoportrait du professeur..., dans la Revue des Deux Mondes de cet été :

"Education Nationale : Il faudrait peut-être que quelqu'un fasse quelque chose.

Aymeric Patricot fut d'abord un petit bolide scolaire - HEC, agrégation de lettres modernes - puis devint professeur et enseigna trois ans durant les lettres dans des quartiers "difficiles", doux euphémisme qui désigne ces territoires français aussi dévastés qu'abandonnés. Cet Autoportrait n'est toutefois pas un de ces nombreux ouvrages, à la fois respectables et déprimants, analysant le choc culturel puis psychique ressenti par des professeurs pétris des trésors de la tradition littéraire, brutalement mis face à une salle de sauvageons. Le récit de Patricot relève en effet moins de l'exercice égotiste que d'une réflexion sur les ressorts de l'éducation des classes paupérisées. C'est un bilan prospectif bourré d'intelligence et de sensibilité, dénué de préjugés comme d'illusions lyriques, aussi éloigné du cynisme que de l'irénisme. Je l'ai lu comme un excellent livre politique sur l'éducation, qui allie une grande capacité polémique à un calme charisme de sympathie.

(...) Patricot pointe l'écrasante responsabilité des politiques. Le fatalisme est une politique, le fatalisme est un pouvoir, et il a naturellement des conséquences en chaîne, comme une politique volontariste en aurait. Il faut aimer les conséquences des causes que l'on veut : ne rien faire, c'est lâcher dans la nature des élèves qui deviendront, sous une forme ou une autre, des ennemis de la société.

Cet ouvrage très sain propose aussi une belle réflexion sur l'identité française. Celle du narrateur a été bousculée face à ces classes de jeunes gens très majoritairement noirs de peau, ou d'origine familiale maghrébine. Il médite sur son réflexe identitaire, consistant à coller à ses origines régionales par réaction, ne se satisfait pas ce mezzo termine, cherche une définition de la France compatible avec ce qu'il voit, et finit par s'en tirer par le haut, en appelant à la rescousse son métier qu'il aime, et sa mission pédagogique à remplir. Au fond, se dit-il, les gamins, ils sont en face de lui, ils sont un morceau de la France de demain. C'est comme ça et c'est bien comme ça.

Cela m'a rappelé soeur Emmanuelle voyant arriver de nouveaux enfants pauvres dans son refuge du Caire, s'écriant : "Remercions le Seigner de nous donner toutes ces occasions d'aimer !"

Il faut aimer avoir les bras chargés, par les temps qui courent
."

Plusieurs site et blogs ont également parlé du livre depuis sa sortie.

La terrible Wrath, qui s'est fait une spécialité de la dénonciation des petits arrangements entre amis dans le milieu des lettres, n'a pas lu le livre mais s'intéresse ICI au jeu des passages d'un éditeur à l'autre.

Le site AutreMonde fait un compte-rendu assez complet du livre, ICI , expliquant combien la démarche est salutaire tout en taclant légèrement l'auteur sur un certain esprit de renoncement.

Le Blog de Morlino déclare vouloir voter pour moi si je me présentais à la présidentielle ICI.

Joli compte-rendu, également, sur le site VOUSNOUSILS.

Ainsi que sur le site My Boox, par Lauren Malka.

Bel article, enfin, d'Ariane Charton sur son blog Les Ames sensibles, à lire LA.