Un article d'Omri Ezrati dans le Huffington Post :

"L'homme de tout temps n'a jamais été clair avec sa propre conscience, il se bat perpétuellement contre lui-même, combat ses propres démons, cherche des explications, sinon des excuses à ses actes. Dans son dernier roman, Aymeric Patricot, un jeune professeur de lettres de 38 ans, qui exerce dans une banlieue populaire de Seine-Saint-Denis, aborde avec courage la violence à l'égard de la femme. L'homme qui frappait les femmes est son troisième roman. Un roman choc qui bouscule les consciences, d'une noirceur fascinante qui n'est autre qu'une confession, celle d'un maudit. Dès l'adolescence, un désir irrépressible de frapper les femmes l'a emporté dans une chute sans fin. La première gifle sera pour une de ses camarades de lycée. Cette première gifle, raconte Patricot, résonne chez lui comme une sorte d'assurance retrouvée, qui lui fait prendre conscience que c'est finalement comme cela qu'il aura du succès et de la reconnaissance sociale.

Cet homme finalement très ordinaire, tout au long de sa vie fera cohabiter deux visages. D'un côté, il fait de brillantes études de sciences politiques, intègre l'assemblée nationale comme administrateur, possède un bel appartement dans le XVe arrondissement de Paris, s'investit au sein d'un grands parti politique, devient même président d'une association féministe. Il vit en couple avec Clarisse avec qui il aura un fils. Mais le soir venu, l'homme se transforme en monstre. Il ne peut s'empêcher de frapper des femmes. Il en viendra même à brutaliser sa propre femme, chose qu'il n'avait jamais imaginé. Une gifle, puis deux, puis trois. L'homme a de la chance, il aura pu voir Clarisse le quitter... Au contraire, elle lui réclame un autre enfant... Ses amis, parfois se détournent de lui, d'autres continuent de le fréquenter car au fond, c'est un homme "bien".

L'homme sait pourtant qu'il est malade, en a conscience, ne sait plus comment stopper la machine infernale qui le conduit à des actes odieux. Il vivra désormais face à l'horizon indépassable du malheur d'autrui et de l'horreur d'être soi, sans échappatoire, comme prisonnier de lui-même et de la force inconsciente qui le gouverne. Quand l'heure de payer sera venue et que la violence se retournera contre lui, il n'aura d'autre solution que d'accepter cette terrible justice, de bénir ce qui le débarrassera enfin de lui-même. Aymeric Patricot approfondit les questions que soulève ce roman choc, d'une noirceur fascinante. Quelle part d'humanité demeure quand le mal emporte une vie ? Quelle est cette zone de nous-mêmes d'où sortent les pires pulsions ? Il prouve ainsi, à la fois en confirmant qu'il est un des romanciers les plus puissants de sa génération et en se montrant capable de prolonger son travail sur le plan théorique, que la littérature demeure un des instruments les plus féconds de connaissance de l'humain.
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