Marc Molk s’amuse en décrivant, dans Plein la vue (Editions Wild Project, 2014), trente tableaux dont il pointe certains détails et relève les cocasseries, les beautés secrètes, les fausses platitudes. Il applique à la lettre le programme contenu dans ce qu’on appelle une ekphrasis : la description animée d’une œuvre d’art, que l’animation se trouve dans l’œuvre elle-même (que l’on songe au bouclier merveilleux d’Achille) ou dans la narration qui la met en scène.

Ici, l’animation se trouve véritablement dans le langage. Marc prend le ton badin, enjoué, de l’amateur qui s’adresse à des amis, mais il n’en délivre pas moins de très sérieuses petites leçons de bon goût – le sien, en l’occurrence, mais présenté de manière si joyeuse que l’étude de la peinture semble alors à la fois facile et lumineuse.

A l’image de cette Etude de fesses de Félix Vallotton, à propos desquelles Marc Molk déclare : « Il s’agit ici de réalisme, de réalisme sévère, avide de cruauté. Il s’agit de fesses parfaitement réelles. Elles ont l’air tremblantes alors même qu’elles ne bougent pas. N’est-ce pas miraculeux ? » La littérature éclairant la peinture qui elle-même éclairait le monde : une sorte de comble de l’art !