Rentrée littéraire 2010 (4)

Cet article, à propos du dernier livre en date du Prix Nobel sud-africain, sera bientôt publié dans la Revue littéraire:

"Certains livres de J.M. Coetzee sont d’âpres romans réalistes (son fameux Disgrâce raconte la descente aux enfers d’un professeur, en Afrique du Sud, qu’on bannit de son Université pour un flirt avec une élève et qui voit sa propre fille se faire violer). D’autres livres du Prix Nobel 2003 sont plus analytiques, plus abstraits, comme ce Journal d’une année noire dont la plus grande part se compose de courts essais de philosophie politique, apparemment détachés du contexte sud-africain. La plupart du temps, cependant, on retrouve dans ses œuvres le regard distancié du narrateur, cette façon qu’il a de vivre les pires tragédies sans se révolter, d’étouffer ses propres sentiments sous une chape d’indifférence et presque de cynisme.

Dans L’été de la vie (Seuil, 2010), le troisième volume de son autobiographie, Coetzee renoue avec cette veine atone en adoptant un procédé qui radicalise cette désincarnation. S’il choisit d’évoquer l’homme qu’il était autour de la trentaine, en revanche il fait parler cinq personnes qui ont compté dans sa vie – une maîtresse, des collègues, une cousine… Elles s’expriment au cours d’entretiens prétendument réalisés par un étudiant cherchant à percer le mystère de l’écrivain. Chacune relate plusieurs épisodes de sa relation avec l’auteur, et l’on cerne de cette manière son personnage, progressivement, sans jamais avoir la certitude de le comprendre vraiment.

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