Un ami - ancien collègue d'HEC - m'envoie un mail pour me raconter une scène drôlatique à propos de mes livres à la librairie La Procure :

"La scène se déroule quelques jours avant Noel, à La Procure, place Saint Sulpice, librairie religieuse notoirement connue pour sa clientèle de grenouilles de bénitier en loden et ses vieilles rombières momifiées. On y trouve une ambiance paisible propice à feuilleter ses achats avant de passer en caisse.

Rarement de passage en France où je ne vis plus depuis un moment, et bien décidé à reconstituer mon stock de livres français, je m’approche d’une vendeuse pour demander de l’aide :
- « Bonjour Madame »
- « Bonjour Monsieur », me répond fort urbainement la responsable du rayon Romans Français, réconfortée par la veste Barbour des plus versaillaises que j’arbore avec une bourgeoise courtoisie
- « Je cherche le roman d’un ami, « Amour chien », que je ne trouve pas dans vos rayons »
Petit temps de surprise de mon interlocutrice, femme que je qualifierai d’entre deux âges pour être poli, toute de grise vêtue, de l’anthracite charbonneux au souris léger.
- « Quel titre ? »?
- « Amour chien » !
- « Amours chiens » ? me répète-t-elle avec le nez un peu pincé par la surprise du titre.
- « Oui, c’est un court roman d’Aymeric Patricot. P…A…T….R… »
- « C’est cela, oui, c’est cela. Laissez-moi regarder dans ma base de publications »
- « C’est le romancier de « Suicide Girls », lui précise-je

Le sourire de façade s’effondre : la vendeuse se demande quel monstre se cache vraiment sous l’apparence du gendre idéal bon tient dont j’avais pourtant tous les attributs extérieurs. Je commence a saisir le décalage de la situation.

- « Amour chien » répète-t-elle en parcourant son écran. « Nous n’avons pas en stock mais…» la voix se fige et elle se tourne vers moi mortifiée « Nous aurons bientôt « l’homme qui battait les femmes » du même auteur »
- « Merci beaucoup » dis-je dans un susurrement a mi-chemin entre l’excuse de collégien pris en faute et le fou rire étouffé.

Avec l’envie de filer au plus vite, alors qu’elle ne quitte pas des yeux, je m’éloigne bredouille de mes envies d’achats mais riche d’une anecdote amusante a te raconter."