La littérature sous caféine


Le Monde, Zemmour et les "petits Blancs"



En décembre 2013, Eric Zemmour publiait dans Le Figaro un compte-rendu de mon livre "Les petits Blancs" dans lequel il me reprochait notamment de rester "politiquement correct". Le paragraphe suivant allait causer quelques remous :

"Misère financière, misère sociale, misère psychique, misère familiale, misère sanitaire même, Patricot laisse parler ses interlocuteurs qui lui confient leurs malheurs, leur sentiment de déchéance, leur haine des autres et de soi ; jusqu'à la misère sexuelle des jeunes prolétaires blancs qui, éduqués dans l'univers du féminisme occidental, ne peuvent rivaliser avec la virilité ostentatoire de leurs concurrents noirs ou arabes, qui séduisent nombre de jeunes femmes blanches, blondes de préférence, comme le prouve le succès du site blanchablacks.com, que Patricot interprète comme la revanche symbolique de la colonisation, sans voir qu'il exprime aussi l'antique attrait des femmes pour le mâle dominant, le vainqueur, à l'instar de ces Françaises qui couchèrent pendant la Seconde Guerre mondiale avec des soldats allemands puis américains."

Philippe Corcuff, pour Rue 89, non sans tacler le livre, a très vite pointé le fait qu'Eric Zemmour me faisait endosser ses propres obsessions, caricaturant des propos qui se voulaient nuancés. Il s'est par ailleurs étonné que je ne condamne pas sur ce blog les amalgames de l'article en question.

Le Monde, en revanche, n'a pas jugé bon de pointer ce qui me différenciait d'Eric Zemmour. Dans l'édition du 9 novembre 2014, la journaliste Ariane Chemin a publié un long article à charge contre Eric Zemmour, à l'occasion du succès phénoménal de son livre "Le Suicide français". Elle y égrène notamment un certain nombre de références et de lectures de Zemmour - les "Petits Blancs" se trouve alors inclus dans une litanie visant Alain Soral, Renaud Camus... Manifestement, le livre n'a pas été lu. L'article reprend le même paragraphe analysé par Courcuff, mais en laissant croire qu'Eric Zemmour et moi tenons les mêmes propos. Il est notamment difficile de savoir quel est l'auteur de telle ou telle phrase :

"Il [Eric Zemmour] continue (...) à creuser le sillon de ses obsessions. Dans Le Figaro, il chronique Les Petits Blancs, d'Aymeric Patricot, un livre qui décrit « la misère sexuelle de [ces] jeunes prolétaires qui ne peuvent rivaliser avec la virilité ostentatoire de leurs concurrents noirs ou arabes ». Les étrangers qui nous prennent nos femmes ! Pour Patricot, c'est « la revanche symbolique de la colonisation ». Pour Zemmour, bien davantage encore : le signe de « l'antique attrait des femmes pour le mâle vainqueur, à l'instar de ces Françaises qui couchèrent pendant la seconde guerre mondiale avec des soldats allemands puis américains ». La version mainstream, en somme, des Années érotiques 1940-1945, de Patrick Buisson (Albin Michel, 2008), une histoire de la « collaboration horizontale », où les femmes n'ont pas souvent le beau rôle - comme dans les « essais » de Soral et de Zemmour."

C'est d'autant plus dommage qu'il s'agit de la seule mention que Le Monde aura fait des "Petits Blancs".

Mes éditeurs de chez Plein Jour ont protesté, estimant que l'article, pour le moins ambigu, prenait la lecture de Zemmour pour argent comptant, sans se soucier de la réalité du livre. Le Monde a finalement publié le correctif suivant, dans son édition du samedi 15 novembre 2014 - coincé sous une grande publicité pour un déstockage massif de canapés convertibles :

"Eric Zemmour. Sybille Grimbert et Florent Georgesco, directeurs de Plein Jour, la maison d'édition qui a publié en octobre 2013 l'essai d'Aymeric Patricot, Les Petits Blancs, tiennent à signaler que la lecture faite par Eric Zemmour de cet ouvrage (Le Figaro du 5 décembre 2013), reprise dans le portrait du polémiste publié dans Le Monde daté 9-10 octobre, "travestit" gravement la pensée de M. Patricot. "Tout l'objet de son travail intellectuel est, précisément, de rendre possible une analyse objective et équilibrée, loin de la radicalisation, dont M. Zemmour est le symbole, des crises identitaires qui traversent notre société."

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