La littérature sous caféine


L'oeuvre de Woody Allen est-elle joyeuse ou désespérée ?


EXCLU - Woody Allen : la bande-annonce en VF
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La morale du dernier film du maître new-yorkais, Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu, pourrait être résumée de la manière suivante : « Dans la vie, ce ne sont pas les individus les plus rationnels qui s’en sortent. Les plus heureux sont ceux qui se concoctent une philosophie simple, naïve, voire purement superstitieuse. Mieux vaut vivre dans l’illusion qu’avec une lucidité qui ne nous est d’aucun secours. »

Le personnage clé du film est une vieille femme que son mari vient de quitter. Déboussolée, elle se tourne vers une diseuse de bonne aventure. Mais ceux qu’elle côtoie se moquent de la confiance qu’elle apporte à ces prédictions. Ils s’agacent, même, qu’elle persévère dans ces croyances. Chacune de ces personnes vivra cependant des drames, pêchera par excès d’orgueil, finira déprimée... La vieille femme, elle, mènera son chemin. Non que la diseuse de bonne aventure ait eu vraiment raison. Mais une certaine candeur, relevée de méthode Coué, sauveront la vieille femme.

Beaucoup de spectateurs, autour de moi, ont trouvé le film sordide : ces échecs, ce manque d’amour, ces gens qui se trompent et butent sur leur propre destin… Mais c'est oublier, à mon avis, la clé de voûte du film, cette morale en creux, ce personnage de vieille femme persévérant dans sa foi naïve. Splendide travail de moraliste ! Woody Allen relève méthodiquement tout ce qu’il y a de ridicule dans les comportements humains. J’ai vraiment été sensible à la dimension profondément comique du film. Le message n’est pas désespéré : il est que nous ne maîtrisons rien de nos vies et qu’il faudrait enfin l’admettre.

Film désespéré, donc, mais surtout joyeux

J’ai lu dans le roman que je dévore en ce moment, L’ennui, de Moravia, un paragraphe qui m’a fortement rappelé le film de Woody Allen. Le narrateur est fasciné par un peintre érotomane absolument dépourvu de talent, mais sans avoir l’air de s’en rendre compte. Voici ce que le narrateur dit de Balestrieri, le peintre en question :

« Peut-être Balestrieri était-il une espèce de fou, mais un fou dont la folie consistait à avoir l’illusion d’être en rapport avec la réalité, c’est-à-dire d’être un sage, comme le témoignaient ses toiles ; tandis que moi, j’étais obligé de me le dire, j’étais peut-être un sage dont la sagesse consistait dans la profonde conviction qu’un tel rapport était impossible, c’est-à-dire un sage qui se croyait fou. » (L’ennui, GF Flammarion, page 117).

Le narrateur est malheureux parce qu’il n’arrive pas à nouer avec la réalité ce rapport naïf (mais substantiel) que parviennent à créer, eux, Balestrieri ou la vieille femme de Woody Allen.

COMMENTAIRES

1. Le samedi 26 février 2011 à 01:14, par Martin

je suis d'accord avec toi sur le dernier woody allen !
et tu donnes envies de lire ce moravia, chouette

2. Le lundi 28 février 2011 à 14:05, par aymeric

une révélation, moravia ! du moins, je me reconnais dans ce qu'il fait et rêverais d'atteindre la qualité de son écriture !

3. Le lundi 28 février 2011 à 15:00, par manue

tiens jai pue voir le dernier de W Allen dans l'avion. j'ai adore, comme d'habitude. Woody etant pour moi un des comiques les plus fins de nos temps modernes. son honnetete sur la nature humaine me fait mourir de rire, ce vide, ce manque de signification de tout. il en parle si bien dans les situations de tous les jours.
je n'ai trouvee aucune tristesse dans ce film, que de la joie et du bonheur. c'est leger, ca se mange sans fin.
comme un ecrivain dont jai oubliee le nom ecrit si bien" j'ai trouve que la vie peut se resumer en 3 mots: la vie continue". ca resume bien ce jolie film.

4. Le lundi 28 février 2011 à 20:12, par aymeric

il avait fait un film, que j'avais d'ailleurs trouvé moyen, sur le fait que toute situation pouvait donner lieu à deux interprétations, une tragique et une comique... Il semble qu'il fasse de plus en plus le choix de la comédie - du moins, de la comédie cruelle ! J'aimerais avoir un jour l'acuité et la joie de son regard ! :)

5. Le mardi 1 mars 2011 à 11:25, par aymeric

Excellent article, et qui relance bien certains aspects de notre petit discussion d'il y a qq semaines ! (j'ai laissé un petit com à mon tour...)
Quant à Woody, je ne dirais pas qu'il critique sa propre misanthropie, mais qu'il choisit d'en rire - un peu comme si Alceste, à la fin de la pièce de Molière Le Misanthrope, choisissait de se débarrasser de sa mauvaise humeur pour adopter une attitude plus enjouée, qui lui permettrait de séduire enfin la jolie femme qu'il aime...

6. Le mardi 21 mai 2013 à 11:06, par jc penney prom dresses

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7. Le dimanche 2 juin 2013 à 18:55, par morsay president

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