La littérature sous caféine


Edouard Glissant à Tokyo


Patrick Chamoiseau & Edouard Glissant sur Obama
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Edouard Glissant, présenté par l’édition du Monde du 4 février comme « le chantre éloquent de la diversité, du métissage », vient tout juste de décéder. J’aimais certains de ses livres, marqués par une poésie sensuelle et luxuriante qui me rappelait celle de Saint-John Perse.

J’aimais aussi une notion qu’il défendait souvent, celle d’opacité. René de Ceccatty y fait référence dans l’article qu’il consacre aujourd'hui au poète martiniquais dans Le Monde : Glissant défendait le processus de « créolisation », « opposé à toute légitimité autoproclamée, à tout système imposé, à toute identité enracinée dans le refus de l’autre, à tout pouvoir, à toute idéologie. L’ « opacité » même devient une caractéristique positive, en contraste avec « la fausse clarté des modèles universels » ».

Mais ce que je retiendrai surtout de Glissant, c’est ma rencontre avec lui lorsque, à Tokyo, j’étais « chargé du livre » à l’ambassade de France, aux alentours de l’année 2000. Jeune homme alors un peu perdu, très maladroit dans ma gestion des affaires quotidiennes, je l’ai reçu, lui, sa femme et son fils, pour une série de conférences, et nous avons passé quelques jours ensemble dans la capitale japonaise. J'étais chargé de ses déplacements et de l'organisation des journées. Malentendus sur les horaires, impression tenace d’être débordé par l’emploi du temps… J'ai été très reconnaissant à Glissant d’avoir pris le parti de rire de ces contretemps : « Aymeric Patricot, m’a-t-il dit dès le deuxième jour, c’est la catastrophe sympathique… » (ou la catastrophe tranquille, je ne sais plus).

Il se moquait par ailleurs volontiers de mon supérieur, qu’il trouvait prétentieux, et j’avais trouvé ça très drôle – je rencontrerais certains autres auteurs qui manifesteraient beaucoup plus de goût, eux, pour les gesticulations snobs du conseiller culturel que pour les maladresses de son subalterne…

COMMENTAIRES

1. Le vendredi 4 février 2011 à 08:37, par manue

c'est sure, c'est toujours agreable des gens qui ne se laissent pas tomber dans le qui est qui. un con c'est un con, meme avec des gants en or. un peu de dignite honnete ca rafraichit.
j'aime bien " la fausse clarté des modèles universels". il a y tellement de modeles d'humains diferents, et c'est bien cela qui rends notre communication parfois dificile.
comment se respecter, et travailler ensemble malgre nos gouts/opinions diferents semble beaucoup plus interressant que de penser que l'on doit tous suivre le meme modele. le modele universel est plus reel dans nos diferences que dans nos gouts en commun. mais que faire de ses diferences? comment les respecter semble une bonne question a suivre.
paix ait l'ame de ce monsieur que je ne connaissais pas:)

2. Le lundi 7 février 2011 à 19:16, par aymeric

c'est sur que c'est plus intéressant, mais c'est aussi infiniment plus difficile ! :)

3. Le mardi 8 février 2011 à 22:41, par aymeric

je pense aussi à segalen, auteur français du début du 20ème, qui évoquait déjà l'idée que dans notre monde où les distances se raccourcissent, le "gradient de différence" entre les cultures s'affaiblit, donc l'exotisme... Le plaisir des voyages va sans doute constamment diminuer, dorénavant !

4. Le jeudi 10 février 2011 à 08:58, par manue

un des trucs facsinant dans cet effet de globalization, est excatement l'effet inverse. les gens semblent aussi se retourner vers des vieilles cultures et langues. comme si d'un cote on se rassemble, de l'autre on se redidentifie avec des vieux trucs. tres interressant comme processus. comme si la perte de culture nous ramene a idealizer nos ancetres. peut etre qu'ainsi on peut commencer a partager nos cultures, sans pour autant perdre celle dans laquelle on a grandi, ou se perdre dans la culture des voisins?

c'est clair que le voyage n'est plus ce qu'il etait. visuellement parlant, une espece d'uniformite se creer dans le design/architecture. cela me frappe toujours, lorsque je feuillette les journaux a la mode d'asie. l'edition, est excactement la meme qu'en europe, usa, etc..ca change un peu de chapeaux, mais l'edition est la meme...

5. Le jeudi 10 février 2011 à 21:55, par aymeric

oui, tu décris très bien le phénomène: chacun cherche à s'enraciner à nouveau au moment où, théoriquement, nous devenons nomades... Cependant ces cultures un peu sur-jouées s'apparentent davantage à du folklore qu'à de la véritable culture, non ?

qu'entends-tu par "l'édition" ?

6. Le vendredi 11 février 2011 à 08:53, par manue

um. est ce que toute culture n'est pas justement cela: un folklore?
vive le yagourt;)

l'edition? je veux dire, comment les pages sont faites, le design du texte, les fonts, placement des photos etc. la page visuel du magazine.
je ne parlais pas ici du contenu...c'est un autre sujet;)

7. Le samedi 12 février 2011 à 00:08, par aymeric

oui, sans doute... ne peut-on maintenant n'avouer une culture que sur un ton relativement ironique ? est il encore seulement possible de "prendre au sérieux" une culture ?

8. Le samedi 19 février 2011 à 14:42, par manue

ah ca yen a qui prennent la culture au serieux! et puis certains moins que dautres. chacun ses gouts et preferences;)

9. Le vendredi 24 mai 2013 à 10:48, par cheap jordans

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