La littérature sous caféine


King en toc ?


The Shining - Trailer (Stanley Kubrick)
envoyé par dictys. - L'info video en direct.

Adolescent, j’ai été marqué par le Shining de Stephen King, qui m’avait à la fois ébloui et terrifié. Le film de Kubrick, à côté, m’avait semblé singulièrement dénué de tous ces détails qui en faisaient la saveur. Trop limpide, trop simple, trop « cinématographique », en un mot…

J’aime bien de temps en temps lire un Stephen King pour essayer de retrouver mes frissons d’enfant, mais force est de reconnaître que je suis assez souvent déçu… Comme avec ma lecture du Fléau, roman de 600 pages (dans sa version courte) considéré pourtant comme l’un des meilleurs. Le thème avait tout pour attiser ma curiosité : maladie ravageant les Etats-Unis, clans s’opposant et se déchirant autour de quelques figures charismatiques…

Le problème est qu’on lit ce roman jusqu’au bout pour savoir comment King va clore cette étrange histoire d’affrontement entre l’homme incarnant le Mal et la femme incarnant le Bien dans cette contrée ravagée par la maladie, mais que le dénouement laisse un singulier sentiment de kitsch et de toc… (Un peu comme pour la chute, grotesque, du fameux film Ça dans lequel une sorte d’araignée géante incarnait, elle aussi, l’esprit du Mal). On n’apprend pas vraiment d’où sortent ces étranges créatures, pourquoi elles meurent, pourquoi elles se comportement de telle ou telle façon, et les scènes d’épouvante font rire bien plus souvent qu’elles n’attirent l’attention.

En revanche la vraie qualité de King réside, paradoxalement, dans ses scènes réalistes, toutes ces histoires qui lient les personnages et leur donnent de l’épaisseur. On comprend son succès d’écrivain : ses personnages sont attachants, parce qu’ils sont singuliers et vivent des relations d’amour ou de haine souvent originales. En fin de compte, le décorum horrifique pourrait presque être évacué… Un comble, pour un roman d’épouvante ! (J’adore ce mot, épouvante… J’ai envie d’écrire des romans d’épouvante rien que pour y accoler ce mot-là…)

COMMENTAIRES

1. Le mercredi 26 janvier 2011 à 22:38, par Club Stephen King

Bonne critique :-)

2. Le jeudi 27 janvier 2011 à 17:26, par aymeric

Alors, le nouveau king, "dome", il vaut le coup ?

3. Le samedi 29 janvier 2011 à 05:31, par Beast Language

Oui, les personnages de King...

Je tente en ce moment même d'analyser son style (comparaisons filées plutôt que métaphores: ce qui est déjà pour moi signe d'un style "inférieur", j'ai mes élitismes; constructions narratives défaillantes... Mais il est vrai que ses incarnations de personnages sont alertes et intéressantes, même si Kubrick trouvait, dans Shining ze novel, Wendy trop animée pour rester avec un type comme Torrance), mais quelque chose, à date, a bloqué...

"Écriture, mémoires d'un métier" m'a toujours paru plus intéressant comme autoportrait (inconscient) de l'écriture de King que pour les conseils qu'il présume de portée générale. Mais encore là, vaste question.

Car quant à moi, si un auteur ne parvient pas à me surprendre par ses phrases mêmes, je m'y désintéresse assez vite, d'autant plus que je suis un lecteur assez lent, que ça soit pour lire J.K. Rowling, ou Pynchon. Du coup je préfère choisir les auteurs dont les phrases sont de haute teneur calorique.

Là-dessus je suis sur le point de terminer "Nexus", la "Recherche du temps perdu" (au sens de récit d'une vocation sur le point d'éclore) de Miller; je vous en reparle!

4. Le samedi 29 janvier 2011 à 11:00, par aymeric

Oui, c'est sûr que la phrase en elle-même n'est pas vraiment le fort de King... Il y en a même de franchement ratées ! Comment lui en vouloir, cependant, quand on voit son rythme d'écriture, proprement effarant ? Son but me semble vraiment être d'écrire de la fiction au kilomètre, quitte à ce que certains chapitres, ou certaines structures narratives soient bancales, mais de manière à créer, peut-être, de véritables transes fantasmatiques desquelles émergent de puissantes visions !

5. Le samedi 29 janvier 2011 à 11:11, par aymeric

quant à pynchon, j'ai longtemps été admiratif de "V", par exemple, mais je sature aujourd'hui... Je n'ai plus le courage d'entrer dans ses monstrueuses constructions romanesques...

6. Le dimanche 30 janvier 2011 à 12:47, par aymeric

tu décris parfaitement l'impression qu'on peut avoir à lire stephen king, parfois: "quincaillerie", "impression que la nouvelle se détruit sous nos yeux..." Il aime décidément bcp les histoires d'araignées dans des cryptes (je me rappelle que dans Cujo, il y avait aussi une histoire de crypte, avec des chauve-souris cette fois)

si tu me dis que pynchon devient plus lyrique, et peut-être plus mesuré en vieillissant, alors oui je vais me remettre à le lire ! :)

7. Le dimanche 30 janvier 2011 à 18:35, par aymeric

tu as raison, il aime bien les explostions providentielles... Comme à la fin du Fléau: une bombe atomique pour régler le compte du diable !! :)

A propos des carnets et des crayons, je prends l'habitude maintenant de noter quelques petits trucs quand je commence à lire des pavés... Je prends le risque, sinon, de perdre le fil si j'interromps quelques semaines ma lecture. Et puis les structures romanesques apparaissent plus clairement, c'est aussi un plaisir, après coup, de voir comment l'objet a été construit... (et dans le cas de King, c'est souvent un joyeux bordel...)

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