La littérature sous caféine


Les frissons métaphysiques de Flaubert (Madame Bovary 1)



J'ai redécouvert cet été Madame Bovary, attentif à la qualité des phrases, puisque Flaubert passe pour l'un des plus grands, sinon la plus grande styliste du 19eme, et à celle de la structure : quel exploit de fonder un roman sur le thème de l'ennui !

Première chose frappante, pour le récent lecteur de certaines oeuvres de Zola que je suis : avec des moyens comparables (récit classique à la troisième personne, dans un style réaliste), Flaubert se montre beaucoup moins ambitieux dans la variété des thèmes traités : il s'en tient à un fil narratif assez mince, et à une gamme de sentiments et de considérations plus étroites. L'ampleur de l'oeuvre de Zola, par comparaison, devient vertigineuse. Pas un endroit qu'il ne veuille décrire, pas un élan de l'âme qu'il ne cherche à scruter.

Les romans de Flaubert (du moins dans cette veine réaliste) parient davantage sur une sorte d'épure romanesque, et c'est peut-être en cela que Madame Bovary paraît plus moderne que tous les Zola réunis : il passe comme un frisson métaphysique dans la description de ce destin tragique de femme courant après un bonheur qu'elle ne parvient jamais à saisir. On est proche de l'abstraction, du constat définitif et désabusé sur la nature humaine.

Le passage suivant est le plus beau du livre, à mon avis : Emma découvre Rouen, ville dans laquelle elle connaîtra bientôt toute la banalité de l'adultère :

"Quelque chose de vertigineux se dégageait pour elle de ces existences amassées, et son coeur s'en gonflait abondamment, comme si les cent vingt mille âmes qui palpitaient là eussent envoyé toutes à la fois la vapeur des passions qu'elle leur supposait. Son amour s'agrandissait devant l'espace, et s'emplissait de tumulte aux bourdonnements vagues qui montaient. Elle le reversait au dehors, sur les places, sur les promenades, sur les rues, et la vieille cité normande s'étalait à ses yeux comme une capitale démesurée, comme une Babylone où elle entrait. (...)" (p317, édition Pocket Classiques)

COMMENTAIRES

1. Le mercredi 3 septembre 2008 à 22:23, par mathieu

l'affiche du film de chabrol que je n'ai pas vu d'ailleurs correspond bien au titre du post

2. Le jeudi 4 septembre 2008 à 14:19, par sacha

"Les passions font moins de mal que l'ennui... " Barbey d'Aurevilly

3. Le jeudi 4 septembre 2008 à 15:24, par pat

quoi que l'ennui a ses qualités : on sent le temps passer, par exemple... Alors que d'habitude il nous échappe completement

4. Le jeudi 4 septembre 2008 à 23:00, par Flora

J'essaie de trouver un personnage masculin qui pourrait ressembler à Emma Bovary... un alter ego en quelque sorte. A part Peer Gynt d'Ibsen, je ne vois pas.

5. Le vendredi 5 septembre 2008 à 07:10, par pat

il y en a sans doute pas mal... Moi je pense aux personnages de houellebecq, aussi bizarre cela puisse-t-il paraitre : au fond ils sont aussi désabusés, et c'est peut etre l"ennui, l'accablement qui les définit

6. Le mardi 9 septembre 2008 à 14:13, par FO

Je pense que le personnage masculin qui s'approche le plus de Madame Bovary est Oblomov, dans le roman éponyme de l'ecrivain russe Goncharov, un contemporain de Flaubert.

Oblomov est l'archétype de l'homme incapable, physiquement comme mentalement, de s'inscrire dans la realité tant elle l'accable de sa pesanteur.

7. Le mardi 9 septembre 2008 à 14:53, par pat

mais il n'essaye meme pas, non ? accablé dès le départ...
La pauvre Bovary, elle, est plutot déçue par toutes les choses, les unes apres les autres...

8. Le mardi 9 septembre 2008 à 18:22, par FO

Je confesse que ma mémoire flanche... J'ai lu Madame Bovary il y a trop d'années, sous la contrainte du programme scolaire (heureusement illuminé par un professeur enthousiaste).
Bref, il va falloir que je relise Flaubert avant de pouvoir confirmer qu'Emma essaye sans succes, la ou Oblomov se contente de se retourner dans son lit !

(Petite note en passant: Pat, j'espere que tu excuseras l'absence d'accents - tu sais que je n'en ai pas de ce coté-ci de la Manche...).

9. Le samedi 20 septembre 2008 à 21:55, par Une page par jour

A propos d'Emma Bovary, je pense à l'histoire de cette jeune femme racontée par Clarissa Pincola Estes dans "Femmes qui courent avec les loups".

Jeune fille, elle aimait se promener avec un beau chapeau, dans les rues de la ville, admirer les boutiques de modes. Puis, la jeune fille se maria à un fermier, de gré ou pas, peu importe. Il y avait les travaux de la ferme, les obligations, etc... et cela paraissait incongru à son entourage de mettre un beau chapeau pour se promener admirer les boutiques de mode. Peu à peu, la jeune femme s'étiola. Puis un jour, elle mit sa plus jolie robe, prit la carabine de son mari, mit le canon froid et gris de l'arme dans sa bouche, et tira...

10. Le samedi 20 septembre 2008 à 23:19, par pat

bah dis donc... C'est une histoire vraie ?

11. Le lundi 22 septembre 2008 à 10:35, par Une page par jour

... il faut lire le livre ...

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